LE PLFSS 2021 ADOPTÉ EN 1ÈRE LECTURE.
L'Assemblée nationale a adopté en 1ère lecture, le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2021 (PLFSS 2021) ce vendredi 27 octobre 2020 avec 326 voix contre 204 . Un moment fort car c'est un budget historique qui a été voté! Un budget d'engagement et de combat.
Le PLFSS pour 2021 répond à la crise sanitaire en finançant l’ensemble des dispositifs nécessaires afin d’en surmonter les conséquences. Mais c’est aussi un PLFSS tourné vers l’avenir puisqu’il consolide et modernise notre modèle de protection sociale, concrétise les engagements du Ségur de la santé pour les personnels des établissements de santé et des EHPAD ; et investit massivement dans notre système de santé.
Nos prédécesseurs ont une grande responsabilité dans la détérioration de l'hôpital public. Aujourd'hui, ils persistent et votent contre un PLFSS qui, entre autres, revalorise concrètement et sérieusement les salaires de nos soignants. Une cohérence dans l'indécence !
Retour sur l'essentiel de ce texte, le contexte et ses objectifs :.
Pour aller + loin: retrouvez l'intégralité du Projet de loi adopté en bas de page.
Crédit photos: assemblee-nationale.fr
L'ESSENTIEL DU TEXTE :
Le PLFSS 2021 s’inscrit dans un contexte budgétaire fortement impacté par la crise sanitaire. Il traduit notamment les engagements pris par le Gouvernement à travers le Ségur de la santé et la création de la 5ème branche de la sécurité sociale.
Parmi les mesures principales :
- Création d’une contribution exceptionnelle pour les complémentaires santé (articles 3 et 10) ;
- Contribution au financement de la prime Covid pour les personnels des services d’aide et d’accompagnement à domicile (article 4) ;
- Prolongement du dispositif d’exonération lié à l’emploi de travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi (article 13) ;
- Gouvernance de la nouvelle branche de sécurité sociale pour le soutien à l'autonomie (article 16) ;
- Financement de la branche autonomie (article 18) ;
- Revalorisation des carrières des personnels non médicaux dans les établissements de santé et les EHPAD (article 25) ;
- Relance de l’investissement en santé pour le sanitaire et le médico-social (article 26) ;
- Modalités de la reprise de dette hospitalière (article 27) ;
- Création du Forfait Patient Urgence (article 28) ;
- Pérennisation et développement des maisons de naissance (article 30) ;
- Soutien au développement des hôtels hospitaliers (article 31) ;
- Allongement de la durée du congé paternité (article 35) ;
- Réforme des dispositifs d’accès aux médicaments innovants (article 38) .
CE QU'IL FAUT RETENIR :
- Des soignants mieux rémunérés , avec une augmentation mensuelle de 183€ (90€ dès septembre, 93€ en décembre)
- Les soignants qui font des heures supplémentaires ou renoncent à des jours de congés bénéficieront d’une compensation financière : majoration de 50% des heures supplémentaires (rémunération horaire qui passe de 20 à 30€ nets pour un infirmier, et de 12 à 20€ pour un aide-soignant).
- L’ouverture de 4.000 lits à la demande , grâce à l'enveloppe supplémentaire de 2,4 Md€ pour l’ONDAM (en plus de la hausse de 10 milliards d’euros déjà prévue en 2020)
- 200 millions d’euros pour les aides à domicile , grâce au nouveau concours financier pérenne versé chaque année aux départements pour améliorer l’attractivité des métiers de l’aide à domicile. Une victoire de la majorité parlementaire. Un objectif: plus aucun salaire en dessous du SMIC.
- L 'extension du congé paternité de 14 à 28 jours dont 7 jours obligatoires : une avancée pour l’égalité femme-homme, qui concernera tous les parents, quel que soit leur statut.
- La prime de naissance sera désormais versée 2 mois avant l'accouchement , et non plus 2 mois après: d’environ 950 €, elle permet aux familles les plus modestes d’accueillir leur enfant dans les meilleures conditions et de leur éviter d’assumer seules les dépenses pour les équipements nécessaires.
- Une meilleure attention portée aux plus fragiles , grâce à l'adoption de l'amendement "La REM" que j'ai présenté . Issu des préconisations du rapport que j'ai remis au Premier ministre avec julien DAMON en 2018 , il vise à charger les organismes de la Sécurité sociale d'une mission de lutte contre le "Non recours" aux droits en "allant vers" le bénéficiaire. Un changement de paradigme pour lutter plus en amont donc plus efficacement contre la pauvreté ( vidéo disponible . Cliquez sur l'image ci-dessous pour lancer la vidéo).
CONTEXTE ET OBJECTIFS :
1/ LES GRANDS ÉQUILIBRES FINANCIERS :
a) L’impact durable de la crise sanitaire sur les comptes sociaux :
La crise sanitaire liée à la Covid-19 a un impact considérable sur le déficit de la sécurité sociale pour 2020 et pour les années suivantes.
L’équilibre des comptes sociaux est affecté à la fois :
- en recettes : recul de la masse salariale de 7,9 % en 2020 entraînant un effondrement des cotisations sociales, baisses des recettes fiscales de CSG et de TVA, annulation et report de cotisations sociales afin de soutenir l’activité ;
> Au total, les recettes du régime général et du Fonds de Solidarité Vieilesse (FSV) diminueraient de 5 % en 2020, soit 20 Mds€.
- en dépenses : augmentation massive des dépenses d’assurance maladie (+15 Mds € en 2020) du fait de l’impact direct de la crise sanitaire (achat d’équipements de protection individuelle, prise en charge à 100% des tests, primes pour les soignants, arrêt de travail pour garde d’enfant, cas contact Covid, personnes fragiles à la Covid etc.) et réformes structurelles engagées suite à l’épidémie (Ségur de la santé, intégré dans l’Objectif National de Dépense de l'Assurance Maladie (ONDAM) 2021 à hauteur de 7,4 Mds€)
Le déficit prévisionnel du régime général et du FSV s’élèverait ainsi à 44,4 Mds€ en 2020 , un niveau très supérieur à celui de 2010 (-28 Mds€), qui était jusqu’ici le plus élevé depuis l’instauration des lois de financement de la sécurité sociale.
En 2021, le solde cumulé du régime général et du FSV devrait présenter un déficit de 27,1 Mds€.
Dans ce contexte, le retour à l’équilibre global du régime général ne serait pas atteint à l’horizon 2024 , comme cela fut prévu depuis le PLFSS 2018 . En 2024, le déficit du régime général et du FSV s’établirait à 21,3 Mds€.
Comparé aux années précédentes, le déficit du régime général et du FSV s’élève à 1,9 Mds€ en 2019 (article 1 du PLFSS 2021 relatif à l’année n-1), soit un niveau nettement plus favorable à celui anticipé dans le PLFSS 2020 du fait d’un dynamisme de la masse salariale plus fort que prévu. Le déficit cumulé du régime général et du FSV s’élevait à 1,2 Mds€ en 2018.
> La crise sanitaire provoque donc une situation inédite dans l’histoire de la sécurité sociale, tant par l’ampleur des effets directs de la crise que par la réponse qui y est apportée.
Dans ce contexte, les lois organique et ordinaire du 7 août 2020 ont repoussé l’extinction de la dette sociale à 2033 (contre 2024 jusqu’à présent) avec un transfert massif de 136 Mds € de dette à la Caisse d'Amortissement de la Dette Sociale (CADES) (légèrement supérieur à celui de la crise de 2008).
b) Des niveaux d’ONDAM inédits :
Compte tenu de l’impact sans précédent de la crise sanitaire, l’ONDAM (Objectif National des Dépenses d'Assurance Maladie) progresserait de 7,6 % en 2020 au lieu des 2,45 % votés en PLFSS 2020 . Pour rappel l’ONDAM voté en PLFSS 2019 était de 2,5 % dans le contexte de l’accompagnement de la réforme Ma Santé 2022 , alors que l’ONDAM voté en PLFSS 2018 était de 2,3 %.
En 2021, hors dépenses exceptionnelles liées à la Covid, l’ONDAM progresserait de 6% , ce qui intègre les mesures de revalorisation et d’investissement décidées lors du Ségur de la Santé (pour 7,4 Mds€ en 2021).
> En intégrant une nouvelle provision de 4,3 Mds€ au titre de la gestion de crise COVID, les dépenses de l’ONDAM 2021 sont estimées à 224,6 Mds€.
La décomposition de l’ONDAM par sous-ONDAM en 2020 et pour 2021 est la suivante :
La construction de l’ONDAM 2021 intègre enfin des mesures de régulation à hauteur de 4 Mds€, qui correspondent aux économies opérées chaque année lors des LFSS (Loi de Financement de la Sécurité Sociale) dans l’objectif de revenir à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale
Les niveaux d’ONDAM 2020 et 2021 ont été réhaussés par amendement afin notamment de prendre en compte l’avancement du versement des revalorisations issues du Ségur de la santé .
A noter qu’une contribution exceptionnelle des organismes d’assurance maladie complémentaire permettra de prendre en charge une partie des dépenses auxquelles l’assurance maladie obligatoire fait face dans le cadre de la gestion de l’épidémie (1 Md€ en 2020, 500 M€ en 2021).
2/ LES PRINCIPALES MESURES DU PLFSS 2021 :
a) La mise en oeuvre du Ségur de la Santé :
- 1/ La revalorisation des salaires des personnels hospitaliers et des EHPAD :
Conformément à l’engagement du Président de la République, le Ségur de la santé constitue un plan massif de revalorisation et d’investissement pour les établissements de santé et médico-sociaux.
Au total, 8,8 Mds€ sont ajoutés à la trajectoire de l’ONDAM 2020-2023 pour la revalorisation des salaires des personnels hospitaliers et des EHPAD, dont 5,8 Mds€ pour l’ONDAM 2021.
Ces revalorisations de 8,8 Mds € représentent :
-
7,6 Mds€ pour les personnels non médicaux des établissements de santé et des EHPAD
publics et privés non lucratifs ;
-
450 M€ pour les personnels médicaux.
Concrètement, c’est 183€ nets/mois au sein des établissements de santé et EHPAD publics et 35€ supplémentaires nets/mois pour les soignants (personnels au contact des malades).
Revalorisation des aides à domicile : en complément de ces revalorisations, un amendement adopté en séance en première lecture à l’Assemblée nationale a permis de créer un nouveau concours financier de 200 M€ versé chaque année par la CNSA aux départements pour améliorer l’attractivité des métiers de l’aide à domicile, et en particulier pour revaloriser les salaires des professionnels.
- 2/ Un plan d’investissement de 19 Mds€ :
Un plan d’investissement massif de 19 Mds€, reposant sur 2 piliers, est mis en œuvre :
-
13 Mds€ au titre de la reprise d’un tiers de la dette des établissements hospitaliers pour redonner les marges financières au quotidien ;
-
6 Mds€ d’investissement pour les établissements de santé et médico-sociaux , le numérique et la création d’un nouveau fonds transversal pour la modernisation et l’investissement en santé (FMIS).
Les financements versés aux établissements dans le cadre de la reprise de dette seront constitués par :
-
Une part socle qui représentera au total 20 % des 13 Mds€, fléchée par l’échelon national selon des critères qui seront précisés par décret, après concertations avec les acteurs hospitaliers ;
-
Une part modulable qui représentera au total 80 % des 13 Mds€ et qui sera attribuée aux établissements bénéficiaires par les ARS dans le cadre de l’enveloppe régionale qui leur aura été allouée et à l’issue du processus de contractualisation qu’elles piloteront à l’échelle territoriale.
Le plan d’investissement de 6 Mds€ doit permettre de financer trois grandes priorités du Ségur de la santé :
-
Les projets hospitaliers prioritaires et les investissements ville – hôpital à hauteur de 2,5 Mds€ engagés sur 5 ans, soit 500 M€ dès 2021, afin de relancer l’investissement structurant et poursuivre la modernisation des établissements de santé ;
-
Le rattrapage du retard sur le numérique en santé à hauteur de 1,4 Mds€ sur 3 ans :
> 800 M€ pour l’intégration des prérequis techniques pour la modernisation, l’interopérabilité, la réversibilité et la sécurité des Services d'Information de santé ;
> 400M€ pour le soutien à la circulation des données de santé;
> 200 M€ sur 3 ans pour renforcer les équipes numériques et les prestations d’accompagnement au sein des opérateurs concernés (par exemple l’agence du numérique en santé (ANS) et la CNAM).
- La transformation, la rénovation et l'équipement dans les établissements médico-sociaux à hauteur de 2,1 Mds€ sur 5 ans :
> 1,5 Mds€ destinés à transformer les établissements les plus vétustes, dont 300 M€ en 2021 ;
> 600M€destinés à l’équipement numérique, dont 100 M€ en 2021.
Afin de permettre d’allouer les crédits de ce plan d’investissement massif de manière transversale, le PLFSS 2021 prévoit la mise en place d’un nouveau fonds transversal pour la modernisation et l’investissement en santé (FMIS) .
Il résulte de la transformation de l’actuel fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP). Le FMIS voit son champ élargi à de nouveaux bénéficiaires (établissements médico-sociaux, structures d’exercice coordonné en ville) et ses sources de financement sont ouvertes à la nouvelle branche autonomie de la sécurité sociale.
3/ La poursuite de la réforme des modes de financement :
Engagée par la loi Ma Santé 2022 et par le PLFSS pour 2020, la réforme du financement des établissements de santé se poursuit, dans le but de baisser la part de la tarification à l’activité (T2A) et de favoriser le financement à la qualité et populationnel.
Le PLFSS 2020 prévoyait ainsi la mise en œuvre de la réforme du financement de la psychiatrie et des soins de suite et de réadaptation (SSR), ainsi que de celles des urgences et des hôpitaux de proximité.
Le PLFSS 2021 prolonge la réforme du financement des urgences avec la création d’une participation forfaitaire Forfait Patient Urgences (FPU) pour les patients en cas de passage aux urgences non suivi d’hospitalisation, en lieu et place du ticket modérateur qui est actuellement de 20 % de chaque prestation bénéficiée.
Le forfait sera de 18€, et sera minoré à 8€ pour certaines catégories de personnes, notamment pour les personnes en affectation longue durée (ALD) et les femmes enceintes. Le FPU est pris en charge obligatoirement par la complémentaire en contrat responsable et par la complémentaire santé solidaire.
Le PLFSS pour 2021 prévoit aussi d’expérimenter un modèle mixte de financement des activités hospitalières de médecine , combinant à l’échelle territoriale une part de financement à l’activité, une part de financement à la qualité et une part de financement dit populationnel assis sur des critères de besoins de soins des patients du territoire. L’expérimentation sera mise en place pour une durée de 5 ans.
- 4/ La poursuite des innovations organisationnelles :
Les conclusions du Ségur de la Santé ont fait apparaitre la nécessité de poursuivre les innovations organisationnelles initiées ces dernières années.
Dans cet objectif, le PLFSS 2021 prévoit :
-
La prolongation jusqu’à la fin de l’année 2022 de la mesure dérogatoire de prise en charge à 100 % des téléconsultations , afin de laisser le temps aux partenaires conventionnels de redéfinir les conditions du recours à cette pratique et aux professionnels de santé de s’équiper des outils et solutions techniques permettant sa gestion dans le droit commun ;
-
La pérennisation et le développement des maisons de naissance , structures autonomes de suivi médical des grossesses physiologiques, de l’accouchement et de ses suites, sous la responsabilité exclusive des sages-femmes qui ont vu le jour à titre expérimental en 2015 ;
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Le soutien au développement des hôtels hospitaliers , hébergements non médicalisés des patients en amont ou en aval de leur prise en charge hospitalière.
- 5/ La structuration de la branche « Autonomie » de la sécurité sociale :
Les lois du 7 août 2020 relatives à la dette sociale et à l’autonomie (CADES) ont créé une 5ème branche de sécurité sociale relative au soutien à l’autonomie, et désigné la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) comme gestionnaire de ce risque. Il s’agit d’une réforme historique qui nécessite une réorganisation financière et concrète des secteurs du soin et de l’accompagnement des personnes âgées et handicapées .
Après la remise du rapport Vachey relatif à cette nouvelle branche en septembre dernier, ce PLFSS propose une première structuration de la nouvelle branche « Autonomie » en déterminant son périmètre, ses moyens de financement pour tendre vers un démarrage à l’équilibre, et les nouvelles missions assignées à la CNSA, qui entre désormais dans le droit commun des caisses de la sécurité sociale .
En devenant une véritable caisse de la sécurité sociale, la CNSA voit son fonctionnement et ses missions évoluer pour prendre directement en charge les prestations de la branche et recevoir en conséquence le financement lui permettant de démarrer à l’équilibre . Une information renforcée du Parlement sera par ailleurs garantie par l’existence d’une nouvelle annexe consacrée aux dépenses de la branche
A compter de 2021, la branche une nouvelle fraction de CSG à hauteur de 1,9 points, portant sur l’ensemble des assiettes de la CSG. Outre ses recettes traditionnelles issues de la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA) et de la contribution additionnelle (CASA) pour 2,8 Mds€, la nouvelle branche autonomie sera donc affectataire de 28 Mds€ de CSG et de 400 M€ de dotation Assurance maladie issue du Ségur.
Pour rappel : à compter de 2024 cette fraction de CSG sera augmentée de 0,15 point supplémentaires (actuellement affectés à la CADES), conformément aux dispositions des lois du 7 août 2020 relatives à la dette sociale et l’autonomie.
La nouvelle branche bénéficiera également d’un effort supplémentaire de 2,5 Mds€ par rapport au précédent budget :
- 6/ Le doublement du congé de paternité et d’accueil de l’enfant :
Le PLFSS 2021 prévoit, à compter du 1er juillet 2021, un doublement de la durée du congé paternité et d’accueil de l’enfant. La durée du congé sera ainsi allongée de 14 à 28 jours, dont une part de 7 jours obligatoires . Le congé indemnisé par la sécurité sociale augmentera de 11 à 25 jours. Pour les naissances multiples, le congé paternité sera toujours allongé d’une semaine supplémentaire par rapport à une naissance simple, soit 32 jours de congés.
Pour aller + loin : retrouvez ci-dessous l'intégralité du Projet de loi adopté en 1ère lecture.